certitude
« Bien sûr, dans ce chercher et trouver Dieu en toutes
choses, il reste toujours une zone d’incertitude. Elle doit
exister. Si quelqu’un dit qu’il a rencontré Dieu avec une totale
certitude et qu’il n’y a aucune marge d’incertitude, c’est que
quelque chose ne va pas. C’est pour moi une clé importante.
Si quelqu’un a la réponse à toutes les questions, c’est la preuve
que Dieu n’est pas avec lui, que c’est un faux prophète qui
8. 1 Rois 19.
22 © Études – 14, rue d’Assas – 75006 Paris – Octobre 2013 – www.revue-etudes.com
utilise la religion à son profit. Les grands guides du peuple de
Dieu, comme Moïse, ont toujours laissé un espace au doute.
Si l’on doit laisser de l’espace au Seigneur, et non à nos
certitudes, c’est qu’il faut être humble. L’incertitude se
rencontre dans tout vrai discernement qui est ouvert à la
confirmation de la consolation spirituelle.
Le risque de chercher et trouver Dieu en toutes choses
est donc la volonté de trop expliciter, de dire avec certitude
humaine et arrogance : “Dieu est ici”. Nous trouverons seule-
ment un dieu à notre mesure. L’attitude correcte est celle de
saint Augustin : chercher Dieu pour le trouver et le trouver
pour le chercher toujours. Souvent on le cherche à tâtons,
comme on peut le lire dans de nombreux passages bibliques.
C’est l’expérience des Pères de la foi qui sont nos modèles. Il
faut relire le chapitre 11 de la Lettre aux Hébreux. Abraham
part sans savoir où il va, guidé par la foi. Tous nos ancêtres
dans la foi sont morts en ayant aperçu les bonnes promesses
mais de loin... Notre vie ne nous est pas donnée comme un
livret d’opéra où tout est écrit ; elle consiste à marcher, che-
miner, agir, chercher, voir... On doit entrer dans l’aventure
de la recherche, de la rencontre, et se laisser chercher et ren-
contrer par Dieu.
C’est pourquoi Dieu est premier, Dieu est toujours
premier, Dieu nous précède9. Dieu est un peu comme la #eur
d’amandier, qui #eurit toujours en premier. Nous le lisons
chez les Prophètes. Ainsi Dieu se rencontre sur la route, en
marchant. Quelqu’un pourrait dire que c’est du relativisme.
Est-ce du relativisme ? Oui, si on le comprend de travers,
comme une sorte de panthéisme indistinct. Mais non, si on le
comprend au sens biblique selon lequel Dieu est toujours une
surprise. On ne sait jamais où ni comment on Le trouve, on
ne peut pas $xer les temps ou les lieux où on Le rencontrera.
La rencontre est l’objet d’un discernement. C’est pourquoi le
discernement est fondamental.
Si le chrétien est légaliste ou cherche la restauration,
s’il veut que tout soit clair et sûr, alors il ne trouvera rien. La
tradition et la mémoire du passé doivent nous aider à avoir le
courage d’ouvrir de nouveaux espaces à Dieu. Celui qui
aujourd’hui ne cherche que des solutions disciplinaires, qui
tend de manière exagérée à la “sûreté” doctrinale, qui cherche
obstinément à récupérer le passé perdu, celui-là a une vision
statique et non évolutive. De cette manière, la foi devient une
idéologie parmi d’autres. Pour ma part, j’ai une certitude
dogmatique : Dieu est dans la vie de chaque personne. Dieu
est dans la vie de chacun. Même si la vie d’une personne a été
un désastre, détruite par les vices, la drogue ou autre chose,
Dieu est dans sa vie. On peut et on doit Le chercher dans
toute vie humaine. Même si la vie d’une personne est un ter-
rain plein d’épines et de mauvaises herbes, c’est toujours un
espace dans lequel la bonne graine peut pousser. Il faut se er
à Dieu. »
François civita catolica Oct.2013